Shanghai – Hangzhou en 45 minutes, grâce au nouveau train, inauguré la veille, qui roule à une vitesse de pointe de 350km/heure! Ma mémoire me sert peut-être mal, mais il me semble qu’à l’époque (dans les années 80) on y mettait 4 heures! (La Chine s’enorgueillit d’avoir le plus long stock au monde de trains à grande vitesse – plus de 7400 Km présentement, chiffre qui doublera d’ici quelques années une fois complétées les lignes Beijing-Shanghai, puis Shanghai-Hong Kong). Bravo, sauf que l’infrastructure manque à l’appel une fois sur place à Hangzhou : impossible d’obtenir un taxi à l’arrivée! Il faut sortir de la gare et « jouer des coudes » sur la rue; finalement je réussis à en obtenir un qui pour 80 yuans (une escroquerie, mais que faire!) va nous conduire à l’hôtel sur le lac.
Sommes descendus au Shangri-la, directement sur le Lac de l’Ouest (XiHu), du côté nord, isolé du tohu bohu de la ville même (Hangzhou fait presque 7 millions d’habitants!). Un hôtel qui m’est familier pour y avoir descendu à plusieurs reprises du temps oèu je vivais à Shanghai (86-88).
Vue imprenable de la chambre (photo ci-haut) – fenêtres panoramiques, c’est comme si on se tenait droit devant une toile grandeur nature dépeignant un de ces paysages classiques de la Chine ancienne! Faut dire que le Lac de l’Ouest occupe une place unique dans l’iconographie chinoise : célébré par poètes, peintres et empereurs, le lac séduit, avec ses pavillons anciens le long des rives, ses ponts en dos d’âne, ses voies piétonnières sur le lac (« causeways ») bordés de saules pleureurs, et puis les collines environnantes en série, superposées, qui se distinguent de par leur couleur azurée variant légèrement d’une chaîne à l’autre. C’est un endroit qui inspire véritablement le calme et la sérénité.
Hangzhou se distincte à plus d’un titre. Capital du pays sous la dynastie des Song (période du Sud) au 12e et 13e siècle, Marco Polo la visita à l’époque et l’a décrit comme l’une des plus belles villes au monde. « Au ciel, il y a le paradis, sur terre Suzhou et Hangzhou » dit encore le vieux dicton chinois! C’est aussi le point de destination du Grand Canal qui la relie à Pékin, œuvre magistrale, creusé au 6e ou 7e siècle. Aussi reconnu pour son thé, le Long Jing ("Dragon Well" tea), depuis la dynastie des Tang (du 7e au 10e siècle).
Pour mon anniversaire, dînons au réputé Lou Wai Lou, sur l’île près de l’hôtel. Nourriture classique de Hangzhou; entre autres le porc Dongpo - gras de porc braisé - et le poulet mendiant (« beggar chicken ») - enveloppé de feuilles de lotus et cuit dans la terre chaude; mais aussi restaurant de masse – Cynthia en fait l’expérience pour la première fois (et sans doute la dernière!)
Trois jours de répit, trois jours de promenades : sur le lac, en bateau poussé par un batelier; le long des « causeways »; dans les collines et forêts immédiatement derrière l’hôtel (à deux reprises, la dernière très tôt le matin, pour admirer le paysage au lever du soleil à partir des terrasses naturelles – on se rend jusqu’à la pagode Baochu – en compagnie de moult chinois qui aiment bien l’exercice matinal, spécialement en montagne (« pao shan »), et exercer leurs poumons en un « cri primal » bien lancé (moins élégants sont ces « renaclages » et expectorations très senties)! De façon un peu moins conventionnelle, jogging à 6 heure du matin sur la « causeway » voisine (Su), sur un bon 5 km. Encore là, nous ne sommes pas seuls – en plus des « marcheurs », il y a ceux qui déjà attendent, en groupes bien organisés, pour prendre les premiers bateaux-promeneurs. Il y a même un vieux bonhomme assez audacieux pour se baigner!
Petit tour en ville, toujours sur le bord du lac, bien aménagé pour les promeneurs et flâneurs – et ils sont nombreux! Visite au temple avoisinant (pour célébrer les rois du Royaume WuYue), après avoir déjeuné au très américain Eudora Station (un burger s’imposait!)
(Ci-bas,le lac, vu du haut des collines, tôt le matin)
La controverse sur l’octroi du prix Nobel de la Paix à un dissident Chinois, Liu Xiaobo, continue. En réponse à l’argument que sert le président du comité en charge de la sélection des récipiendaires du Nobel, à savoir que le respect des droits de la personne transcende la souveraineté nationale (« Why We Gave Liu Xiaobo a Nobel » par Thorbjorn Jagland, dans le NYT du 22 octobre), la Chine répond qu’il n’en est rien, qu’il n’y a aucun fondement en droit international à cette assertion, et qu’il ne s’agit là de toute façon que d’un prétexte pour attaquer la Chine nouvelle et son émergence comme force mondiale (« Nobel decision motivated by Cold War thinking”, par Ji Shiping, dans le China Daily du 30 octobre)!
Un débat qui remet en question évidemment les fondements mêmes de la notion d’État-Nation qui sous-tend présentement toutes les relations internationales, à savoir que les états ne sont pas sensés se préoccuper des affaires nationales (« domestic » dirait-on en anglais) des autres (Liu XiaoBo est un criminel, jugé et condamné en bonne et due forme, aux yeux des autorités chinoises).
Mais dans un monde de plus en plus interdépendant, cette notion n’est-elle pas dépassée? Peut-être, dans le domaine de l’environnement par exemple, mais on la remplace par quoi? Ou tirer la ligne? Les américains par exemple jouent des deux côtés, en refusant d’une part de reconnaître la portée de la Cour Pénale Internationale ("ICC") qui , à leurs yeux violerait le principe de la souveraineté nationale, et d’autre part en attaquant l’Iraq, en violation du droit international! Pas facile…mais je pense qu’il faut errer du côté du changement, et contribuer à trouver de nouveaux fondements aux relations internationales qui tiennent en compte les réalités plus prépondérantes de l’interdépendance planétaire…
Les rapports de presse venant d'Hanoi aujourd'hui,oèu se rencontraient les chefs d'état de la région, à l'occasion de la rénion annuelle au sommet de l'ASEAN (et à laquelle se joint en paralèlle comme à l'habitude le Secrétaire d'état américain) font état d'une tension qui va d'ailleurs en s'aggravant entre la Chine et ses voisins qui détectent de plus en plus une "agressivité" montante de la Chine dans ses rapports avec le reste du monde...danger à l'horizon...
Fermons la parenthèse!
Long retour et longue journée: d’abord Hangzhou-Shanghai, toujours par le nouveau train à 350km/heure (photo ci-haut), puis la traversée de Shanghai d’ouest en est, d’un extrême à l’autre, de la gare à Hongqiao à l’aéroport international à Pudong (45 minutes en voiture – l’alternative aurait été le métro, d’une seule traite: 28 stations le long de la ligne 2!), et enfin le vol trans-pacifique Shanghai-Toronto en direct, 13 heures et demie. Tout çà en moins de 18 heures à la montre, grâce à la magie du décalage horaire (douze heures - donc 30 heures en temps réel)!
30 octobre 2010
P.S. 8 décembre, dans Le Monde...
La Chine, timonier de la fronde anti-Liu Xiaobo
A trois jours de la cérémonie officielle de remise du prix Nobel de la paix à Oslo, la Chine a de nouveau bravé, hier, les remontrances de la communauté internationale. Pékin a ainsi affirmé sans ambages que ceux qui soutenaient le dissident chinois emprisonné Liu Xiaobo, récompensé cette année, étaient "des clowns orchestrant une farce" (The Guardian). Signe que les pressions de la Chine ne sont pas sans effet, 19 pays ont d'ores et déjà décliné l'invitation du comité Nobel - contre six il y a trois semaines, souligne le New York Times -, dont la Russie, l'Arabie saoudite, le Pakistan ou encore l'Iran (BBC). La haute commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Mme Navi Pillay, sera également absente vendredi (The Daily Telegraph). A l'inverse, 44 Etats, parmi lesquels l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud, ont choisi de faire le déplacement, au risque de susciter l'ire de Pékin. Condamné fin 2009 à onze ans de réclusion après avoir corédigé la "Charte 08" en faveur d'une Chine démocratique, Liu Xiaobo, 54 ans, pourra également compter sur le soutien d'autres dissidents (Wall Street Journal), dont celui de son compatriote Bao Tong (NY Times).